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    Qui est Gauvain Sers, le jeune chanteur de 26 ans qui accompagne Renaud dans son Phénix Tour ? Interview du petit protégé d'une légende vivante de la musique française, en concert à Bordeaux le 6 avril à la Patinoire Meriadeck.

     

    Gauvain Sers, le jeune protégé de Renaud

     

     

    D'où est venu ton attrait pour la musique ?

     

    Petit, mon père était passionné par la chanson française, par Brassens, Brel, qu'on écoutait beaucoup dans la voiture, pendant les vacances. Adolescent, j'ai commencé à écrire des textes, puis à jouer de la guitare, et finalement j'en suis venu assez naturellement à faire des concerts.

     

    Quelles sont tes inspirations musicales ?

     

    J'ai énormément d'inspirations, j'espère un peu être un mélange de ce melting-pot artistique. Je suis évidemment énormément inspiré par les grands chanteurs français, Jean Ferrat, Renaud bien sûr, Souchon,et puis aussi par des compositeurs anglophones, comme Neil Young ou Bob Dylan.

     

    Tu es passé d'une classe prépatoire scientifique au monde de la musique. Comment s'est passé cette transition ? Elle a été bien accueilli par ton entourage ?

     

    Ça n'a pas été aussi brutal, j'écrivais déjà quand j'étais en école d'ingénieur. En fait je voulais aller jusqu'au bout, obtenir mon diplôme pour m'assurer une sécurité ; mais à aucun moment je n'ai regretté d'avoir choisi le monde de la musique. J'avais au fond de ma tête un petite voix qui me disait de suivre cette route, et j'ai bien fait de l'écouter. Evidemment, au début, ma mère était très inquiète : le monde de la musique est très aléatoire, et le statut d'intermittent est comme une épée de Damoclès au-dessus des têtes des artistes. Mais j'ai de la chance, ça se passe très bien, et maintenant ma mère est rassurée (rires).

     

    Comment décrirais-tu ta musique ?

     

    Je dirais que c'est de la chanson française, avec des teintes de folk dans l'accompagnement à la guitare. J'écris des chansons en rapport avec l'actualité et le quotidien, des chansons d'amours, des chansons sociales, des chansons coup de gueule... J'aborde vraiment des sujets très différents. J'écris des chansons classiques dans la forme et, je l'espère, modernes dans le fond.

     

    Tu as 26 ans, et tu viens de signer chez Universal, tu as été dans des émissions aux côtés des plus grands : comment vis-tu ce succès ?

     

    C'est beaucoup de joie... Dans le milieu musical, ce n'est pas facile d'être considéré, reconnu, ce n'est vraiment pas évident. Dans l'émission dont tu parles, c'était vraiment particulier, j'étais à côté d'artistes que j'admirais depuis toujours... Mais c'est une immense joie, et beaucoup d'excitation : les concerts se passent très bien, l'important est de ne pas prendre la grosse tête ! (rires)

     

    Comment s'est faite ta rencontre avec Renaud ?

     

    La première fois qu'on s'est réellement rencontré, en face à face, c'était au Café de Montparnasse, il m'avait donné rendez-vous. La première chose qu'il m'a dit, c'était qu'il prenait un risque en me mettant en première partie de son concert au Zénith. Mais il a été très gentil, très généreux, et drôle. Il était déjà très emballé par ce que je faisais, et une demi-heure plus tard on est allé chez lui pour jouer de la musique, parce que Renaud n'avait entendu que deux chansons et il avait envie de voir ce qu'on savait faire d'autres. Il est vraiment tel que je l'imaginais, c'était une belle confirmation.

     

     

    Gauvain Sers, le jeune protégé de Renaud

     

    Te dirais-tu plus inspiré par la musique actuelle de Renaud ou celle qu'il faisait dans les années 70-80 ?

     

    J'aime bien toutes ses périodes, quand il était jeune et fougueux et qu'il tapait un peu sur tout le monde c'était assez jubilatoire, mais c'est vrai que Mistral Gagnant et Morgan de toi sont ses deux albums que je préfère. Mais j'adore aussi A la belle de mai, sorti dans les années 90... C'est vrai que ses albums les plus récent sont peut-être un peu plus arrangés, et je suis un peu moins fan. Mais je trouve que ces évolutions musicales retracent bien son parcours : on a d'abord sa fougue de jeune, ses coups de gueule, puis ensuite quand il est devenu papa, il a davantage écrit sur ses rapports avec sa fille, sur la paternité... Et aujourd'hui, il écrit des chansons tournées vers le passé. En fait, sa musique trace le fil rouge de sa vie.

     

    Tu as hâte de passer de première partie à tête d'affiche ?

     

    Oui, bien sûr, forcément. C'est une chance immense que de faire la première partie de Renaud : on joue à chaque fois dans des salles superbes, devant 6 000 personnes minimum... Mais c'est un peu frustrant, on ne joue que 5 morceaux, et j'ai envie de faire découvrir le reste de mon univers. Ce qui va vite arriver : ma tournée débute en octobre. En attendant, je profite à fond des derniers concerts avec Renaud !

     

    D'où t'es venu l'inspiration pour écrire Mon fils est parti au Djihad ?

     

    En fait j'avais lu plusieurs témoignages de parents dont les enfants ont été endoctrinés, j'avais déjà envie de comprendre avant le Bataclan et le battage médiatique qu'il y a eu ensuite autour de ce phénomène. J'ai lu un témoignage en particulier qui m'a énormément marqué, et m'a donné envie d'en faire une chanson. C'est vraiment quelque chose qui peut arriver à Monsieur et Madame Tout le Monde, il ne faut pas blâmer les parents : c'est ce que j'ai voulu exprimer dans ce texte.

     

    A qui destines-tu cette chanson ?

     

    A tout le monde, bien entendu ; mais si ça peut faire réfléchir un ado perdu, ce serait le plus des cadeaux. Et puis aux parents, évidemment, qui sont victimes de l'endoctrinement de leurs enfants.

     

    Tes textes sont engagés politiquement (Hénin-Beaumont) : que penses-tu de l'actualité politique ? Tu pourrais faire une chanson sur les élections présidentielles ?

     

    Oui, ça pourrait être un sujet. Il se passe tellement de choses en ce moment... Chaque semaine il y a des affaires différentes, la campagne présidentielle française est si imprévisible... Entre ce qui s'est passé aux Etats-Unis, la montée du Front National, les affaires juridiques à qui mieux mieux, ça fait assez peur. Et puis les gens n'ont plus l'air de s'intéresser à la politique, c'est assez déprimant.

     

     

     

     

    Renaud avait affirmé son soutien à Mitterrand, puis son désaccord avec le tournant de la rigueur en 83 ; il s'est engagé pour des luttes identitaires, dans la Marche des Beurs... Est-ce que tu pourrais réellement t'engager politiquement, pour un candidat ou un parti ?

     

    Oui, bien sûr, si je suis emballé par un programme ou un candidat ; mais je ne sais pas si je l'afficherais dans les médias. Je ne sais pas, peut-être que ça relève du privé. C'est sûr que les artistes ont plus de visibilité, plus d'audience pour parler de ce genre de choses, pour pousser à l'engagement, ils parlent à beaucoup de gens, ça peut faire bouger les choses. Il y a tellement de causes à défendre... Moi, personnellement, je me sens très concerné par la cause des sans-abris : ça me révolte qu'en France, en 2017, il y ait encore des gens qui dorment dans la rue. Il y a d'ailleurs un texte dans mon album qui sort prochainement, qui raconte l'histoire d'un clochard ; c'est une manière pour moi de m'engager. J'en ferais plus quand j'aurai davantage de temps.

     

    Quel est ton meilleur souvenir de scène ?

     

    Il y en a énormément ! Je dirais, mon premier concert en tant que tête d'affiche, la semaine dernière à Paris, et aussi la première date avec Renaud, c'était magique.

     

    Et ton pire souvenir de scène ?

     

    Laisse moi réfléchir... Je touche du bois, je n'ai jamais eu pour l'instant de grosse galère technique en plein concert. Par contre, ça m'est déjà arrivé de casser une corde de guitare en plein concert. Heureusement, Martial qui m'accompagnait avec prévu une autre guitare, donc on a évité le pire (rires).

     

    Ton premier album sort le 9 juin, qu'est-ce qu'on pourra trouver dedans ?

     

    Eh bien pleins d'autres chansons, qui retracent là aussi le fil rouge de ma vie... Je suis originaire de la Creuse, et maintenant je vis à Paris, donc mon album repose vraiment sur ces deux aspects, campagne-capitale. J'ai donc des chansons qui parlent de la ruralité avec Sur ton tracteur, un texte sur le poulet du dimanche, et puis d'autres textes beaucoup plus urbains, sur le bus ou un sans-abris. C'est un album pleins de surprises.

     

    Renaud te présente comme « l'avenir de la chanson française ». Est-ce que tu envisages à un moment dans ta carrière de faire des textes en anglais et de t'exporter à l'international ?

     

    Non, pas du tout. Je ne me sentirais pas à l'aise avec des textes en anglais ; je t'avoue que mon niveau d'anglais n'est pas terrible, et en plus je trouve que la langue française est très riche, suffisamment riche pour qu'elle guide toutes mes compositions.

     

    Quels sont tes projets ?

     

    Mis à part mon album qui sort prochainement et ma tournée en octobre, j'aimerais bien faire un recueil de textes en parallèle sur la vie de tus les jours. Ce serait de la prose, pas vraiment un roman mais pas vraiment des chansons non plus, plutôt des mini-scènes de la vie quotidiennes qui m'inspirent, sur le café, sur la rentrée scolaire... Je suis inspiré par le quotidien, par la beauté du banal.

     


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